La réforme des trotteurs français

Aujourd’hui est un sujet particulier puisque je ne vais pas vraiment vous parler de chevaux mais plus d’équitation. Et en fait, je vais vous parler d’une des filières du sport équestre : les courses de trot !

Non ne quittez pas l’écoute de ce podcast tout de suite s’il vous plait !

Je sais que ce sujet va rebuter nombreuses d’entre vous au premier abord… Il m’a aussi rebuté durant des années. Franchement ces méchants éleveurs et entraineurs qui mettent à la poubelle leurs magnifiques chevaux qui leur ont tant donnés sans même un regard en arrière ! Bouuuuuh !!

Alors oui, il y a des humains qui sont comme ça… Mais pas tous. Et aujourd’hui on va parler des autres humains ! Ceux qui vivent avec et grâce à leurs chevaux en leur apportant tout l’amour nécessaire sans pour autant oublier qu’il faut bien mettre des pâtes dans l’assiette pour manger à midi…

Parce que oui c’est toute la complexité de la filière. Comme tous les humains, nous avons un métier qui nous permet de gagner de l’argent pour acheter nos pâtes et le foin de nos chevaux. Sauf que dans la filière « course de trot » le métier est en lien avec les chevaux, et les chevaux sont un peu comme des ouvriers… Ils sont mis au travail pour gagner leur foin.

Sauf que certains chevaux ne sont pas assez efficaces et sont donc réformés, mis à la retraite de leur carrière sportive et des fois traités comme des rebuts. Pourquoi ? Comment en est on arrivé là ? Est-ce que les trotteurs réformés sont vraiment des chevaux à mettre au rebut ? Tout juste bon à finir comme bête noire du CSO du centre équestre ou même en chasse à courre…

Aujourd’hui, avec cet épisode de podcast j’ai envie de vous faire un tableau « réaliste » de la filière des courses de trot et surtout de leur réforme pour que vous vous fassiez votre avis en étant un peu plus éclairé.

  1. Anatomie d’un trotteur
  2. Reforme d’un trotteur, comment ça se passe
    1. Avant les qualif
    1. Peu de temps après les qualifs
    1. Après une carrière de course
  3. Réforme d’une trotteuse

Anatomie d’un trotteur

Premièrement, est ce que vous saviez que le trotteur français n’a pas de standard ! Moi non avant d’écrire cet épisode !

Croisement de PS, trotteur de Norfolk et trotteur d’Orlov

Race à part entière depuis 1922

Ajout de sang américain à partir des années 70

Alors oui, pour reconnaitre un trotteur on peut partir sur sa tête busquée mais pas que ! XD

Un trotteur est un cheval compact, robuste et relativement imposant. Le dos des trotteurs est assez court et droit. Ils peuvent donner l’impression qu’il est long et qu’il y a de la place pour seller mais attention à leur épaule qui recule énormément. L’épaule a d’ailleurs été sélectionné pour aller chercher « loin devant ».

Toute l’arrière main du trotteur est puissante et elle aussi sélectionnée pour apporter énormément de puissante de poussée mais le rein droit transmet plutôt une poussé horizontale que verticale.

Les membres du trotteur sont assez larges et résistants.

Alors si on traduit un petit peu plus.

  • Arrière main puissante et rein fort = forte poussée de l’arrière
  • Dos court, compact et droit = forte transmission de la poussé de l’arrière vers l’avant
  • Epaule oblique qui va chercher loin = en plus d’avoir un moteur à propulsion le trotteur à aussi un moteur à traction !!

Toute l’anatomie du trotteur est conçue pour aller de l’avant, vite et fort, en toute franchise. Le trotteur peut avoir confiance en son corps pour aller en avant, et bien sûr pour privilégier le trot plutôt que le galop 😉

L’ajout de sang américain a eu tendance à alléger la morphologie des trotteurs modernes.

Voilà pour l’aspect morphologique du trotteur de course. Ces points vont nous permettre d’un peu mieux comprendre comment et pourquoi les trotteurs sont réformés.

La réforme d’un trotteur

Avant la qualif

Qu’est ce que c’est déjà la qualification ? Tous les trotteurs ne vont pas sur un hippodrome, avant de pouvoir participer à des courses ils doivent se qualifier. C’est-à-dire prouver qu’ils sont assez compétents pour que les portes du monde des courses s’ouvrent à eux.

La qualification est un test d’aptitude chronométré, sur 2000 m, réalisé dans des conditions similaires aux conditions de course. Les chevaux doivent réaliser le « parcours » en un certain temps, défini selon leur âge et leur disciplines (monté ou attelé). Les trotteurs peuvent se qualifier dès le mois de mai de l’année de leur 2 ans pour la partie attelée. Il faut attendre le printemps de leurs trois ans pour les qualifications montées.

Pour passer la qualification cela demande à ce que le cheval soit déjà entrainé et relativement compétent.

Lors des entrainements préliminaires les entraineurs repèrent donc assez vite les chevaux qui n’ont pas les capacités pour être qualifié. Ca peut être un cheval qui va à la faute, c’est-à-dire qui prends le galop, ou un cheval qui n’a pas le courage mental d’aller chercher la victoire. Ou même juste un poulain qui n’est pas du tout bâti physiquement pour courir, celui là sera donc même surement réformé sans même avoir vu un sulky !

A ce stade des chevaux sont déjà réformés mais pour autant pour moi ce sont des chevaux « normaux ». Certains ont déjà été entrainés mais peu. Le cheval réformé à ce stade est encore peu imprégné du monde des courses. Il porte par contre les informations génétiques de ces ancêtres et donc une certaine pression pour réussir.

Après la qualif

Après le stade des qualifications, certains trotteurs font une petite dizaine de course puis sont arrêtés par manque de résultat. Certains chevaux qualifiés ne voient même pas de course. Nous verrons après pourquoi, dans la partie sur la réforme des poulinières 😉 Ceux là sont un peu des hybrides, ils ont plus connu le monde des courses, avec un entrainement plus poussé mais ne sont pas encore rompu à l’exercice des courses 😊

Bon quand même si votre cheval est réformé à ce stade sachez que c’est un cheval qui a plus de prédisposition pour trotter que pour galoper !! Il va donc y avoir un gros travail de rééducation à faire si vous voulez un cheval « normal », qui galope comme un selle français !

Après une carrière de course

Après un certain nombre de course, les réformes des trotteurs se font pour deux raisons majoritaires : un problème physique ou l’approche des 10 ans. En effet, en France les chevaux n’ont plus le droit de courir après leurs 10 ans. Ils sont donc réformés, ou vendu à l’étranger pour continuer leur carrière. Il y a bien évidemment une différence selon le sexe du cheval. Un entier qui court et gagne jusqu’à 10 ans sera conservé à l’élevage 😉 Les juments peuvent également pouliner. Les hongres… Bah ils ne peuvent plus reproduire, donc réforme ou vente à l’étranger 😉

Les réformes pour raison de santé sont également fréquentes. Et attention, une réforme du monde des courses n’est pas synonyme d’une fin de vie sportive !

La guérison des trotteurs de courses dépend d’un principal argument : le potentiel de retrouver un cheval performant en course après rémission. Cela ne veut pas dire que le cheval ne peut plus être performant dans le milieu du loisir. Les contraintes physiques sur les chevaux de course sont énormes. Un tendon fragilisé peut très bien ne pas handicaper le cheval en balade ou en saut mais être fatal au cheval de course.

Par ailleurs le facteur temps rentre en compte. Une tendinite par exemple prends du temps à consolider. Or on l’a vu, la carrière des chevaux de course en France est officiellement interrompue à 10 ans. Donc un cheval de 7/8 ans qui déclare un problème physique sera juste mis en retraite un peu en avance.

En encore une fois, un problème physique pour la course ne veux pas dire que ce problème sera génant pour la suite de la carrière du cheval 😉

Par contre là il faut vous accrocher à votre pantalon si vous voulez un cheval qui galope !

Votre cheval a été :

  • Conçu pour courir vite au trot
  • Sélectionner pour ses performances au trot
  • A gagner parce qu’il trotte vite et bien sans jamais prendre le galop
  • Entrainer à pousser toujours plus le trot et à le garder coute que coute
  • Entrainer à maitriser son équilibre au trot, dans les courbes et les lignes droites.

Vous avez un crack du trot à grande vitesse quoi xD Vous avez aussi un cheval :

  • qui a appris à communiquer avec sa bouche et donc avec vos mains et non vos jambes
  • qui aime la compétition. Je ne pense qu’aucun n’arrive à ce stade sans avoir le mental d’un compétiteur
  • qui a appris à écouter son driveur / jockey et à lui faire confiance pour prendre des décisions (il ne réfléchis pas trop loin quoi)

Ça c’est pour les points un peu négatif de votre cheval de réforme… Mais il y a des points positifs :

  • normalement tous les soins courants se font les doigts dans le nez
  • votre cheval embarque et voyage comme une fleur
  • il a un courage sans faille (pareil, il n’est pas arrivé ici sans son mental)
  • il sait tenir sa place dans sa ligne de course et donc dans une ligne de randonnée 😉

Si si je vous jure il y a des bons points à adopter un trotteur de réforme, rien que pour son cœur sans limite ! N’oubliez pas, les trotteurs sont sélectionnés génétiquement depuis des années pour être généreux et courageux, votre trotteur, quelque soit l’âge de sa réforme porte ses traits de caractère dans sa génétique !

Passons maintenant à un autre sujet que j’ai découvert il n’y a pas longtemps :

La réforme des trotteuses

Alors là je tiens d abord à remercier Charline (@ode.to.delight sur instagram) ! Je suis aller faire une séance de shiatsu pour sa trotteuse et Charline m’a dit « Elle est trotteuse ONC »… Heu oui, c’est-à-dire ? Elle est trotteuse ou ONC ? Et à Charline de me répondre « Bah elle est trotteuse mais ces parents ne sont pas qualifiés pour la reproduction donc elle est ONC »… Okaaaaay… Donc ça c’était le premier point, et en plus la jument de Charline est hébergée dans un élevage de trotteurs. J’ai donc pu discuter avec l’éleveuse et découvert cette partie du monde des courses qui m’a donné envie de vous en parlez ❤ Parce que oui, j’ai découvert des choses mais surtout découvert une éleveuse qui adore ces chevaux.

D’ailleurs vous savez que la majorité des élevages de trotteurs sont des élevages qui recensent moins de 3 juments ??? Donc des tous petits élevages où les éleveurs vivent avec leurs chevaux, les connaissent par cœur et font tout pour qu’ils sont bien. En plus l’élevage de trotteurs est un élevage extensif, les chevaux vivent au pré, en troupeau ❤

Du coup, revenons à la reproduction des trotteurs français expliqué grâce à Charline ! =D

Mise à la reproduction

Déjà comme on l’a vu, la race du trotteur français est une des plus représentée dans l’hexagone. C’est un élevage extensif avec beaucoup de chevaux, il a donc fallu réglementer un peu sa reproduction pour garder une certaine qualité de race. Et c’est la SECF (Société d’Encouragement de l’elevage du Cheval Français) qui gère la mise à la reproduction des TF. La mise à la reproduction des juments TF n’est pas systématique et n’est pas au bon vouloir de l’éleveur.

Ouai parce que les éleveurs ne peuvent pas juste dire « elle a une bonne tête je vais lui faire faire un poulain » xD

Le but est de valoriser les meilleurs lignés de performeurs et d’arrêter celles qui ne fonctionnent pas. Il gère aussi bien la partie étalon que la partie poulinière, les deux groupes ayant des règles bien différentes, le point commun : ils doivent tous être admis à la reproduction par le studbook et cette admission n’est pas immuable : elle va changer tout au long de la carrière du cheval. Bougre… un reproducteur peut donc cesser de l’être au cours de sa vie et pas seulement parce qu’il est castré !

Pour les étalons c’est « simple », s’ils gagnent des courses ou sont juste placés c’est bon, ils restent étalons. Pour les juments ça se compliqué… La mise à la reproduction est liée à 4 choses : les performances en course (comme les étalons) mais aussi la descendance, l’ascendance et la fratrie (côté maternel).

C’est donc les poulinières qui portent la responsabilité de leur lignée !

Il existe 6 catégories de poulinière, de 1 à 6. La catégorie 1 étant l’élite des poulinières. La catégorie 6 est composée des poulinières « même pas qualifiée » mais quand même acceptée en reproduction. Les catégories servent à donner plus ou moins de valeur à la carrière sportive de ladite jument dans la reproduction en trotteur français. C’est un peu un gage de qualité en sorte.

Les catégories sont liées aux performances en course de la jument et sur les performances de la descendance sur les juments d’âge. Vu que la carrière en course s’arrête à 10 ans, à partir de leurs 14 ans, les poulinières ne peuvent compter plus que sur les performances de leurs descendances pour rester poulinière.

Et donc une jument peut devenir poulinière si :

– Elle a une victoire en course.

– Être fille de jument 1ere catégorie.

– Être classé en 1ere ou 2e catégorie grâce à ses performances.

– Être soeur/fille d’une jument ayant gagné une course de groupe 1 ou 2.

– Etre fille de jument de 2è catégorie et avoir réussi les épreuves qualificatives.

La mise à la reproduction est autorisée à partir de la 5ème année de la jument. Elle peut avoir une exception si elle est fille de jument de catégorie 1 ou 2 et reproduire à partir de 4 ans à ce moment.

Généralement, si la jument à de belles performances, elle va faire sa carrière hippique avant de devenir poulinière. Car plus elle gagne/ou elle est placée plus elle a de valeurs après dans la reproduction.

Donc ça c’est pour la mise à la reproduction des juments. Sauf qu’on l’a vu, le statut de reproductrice peut être remis en cause :

  • la jument peut être suspendue de reproduction
  • la jument peut être interdite de reproduction

Premier cas : suspension de la jument TF

Les juments TF peuvent être suspendue de reproduction si elles n’ont pas produit assez de descendants classés dans des courses des groupes 1 et 2 (les meilleures courses quoi). La France compte seulement 23 courses de groupe 1… La majorité des courses groupe 1 sont courues sur l’hippodrome de Vincennes (20). Enghien, Cagnes-sur-Mer et Caen en accueillent une chacun.

Les juments peuvent également être suspendue de reproduction si elles ne produisent pas assez de poulain qualifié aux courses de trot. En gros 1 tiers de leur production doit être qualifiés. Sauf qu’on l’a vu avant, en moyenne seul 1/3 des poulains sont qualifiés. C’est une moyenne, c’est-à-dire que cela peut être moins 😉

Il y a aussi la suspension des poulinière qui, 9 ans après la première saillie ne sont pas 1ère ou 2ème catégorie (donc grâce au classement de leur poulains).

Second cas : interdiction de reproduction de la jument TF

Il existe aussi des juments dites « toute reproduction interdite ». Ce sont des juments que l’éleveur/propriétaire sort de tout circuit de reproduction et touche une prime pour cela. La jument n’aura plus le droit de reproduire quelle que soit la race.

Vous l’aurez compris c’est donc assez « facile » pour une jument de devoir quitter le circuit de reproduction et il y a une grosse pression sur les juments et sur les éleveurs pour produire, qualifier et faire gagner les poulains. Et donc aussi une grosse pression sur les poulains… Il faudrait un jour que je fasse un épisode sur la pression subit par certains arbres généalogiques et les problèmes que cela fait germer chez les chevaux…

Le grand but de ce système est assez beau dans le sens où il permet de valoriser la race et de limiter les naissances d’une race déjà très nombreuse en France. La reproduction des TF essaye de se diriger vers la qualité plutôt que la quantité et c’est très bien ! Sauf que comme d’habitude, là où il y a de l’argent en jeu il y a des dérives et un endroit qui brasse beaucoup d’argent c’est bien le monde des courses…

Et donc ? Que deviennent ces petites juments TF reformées de la reproduction ? Boucherie et vente à bas prix dans des clubs équestres… La chasse à courre ou les laboratoires sont également des voies de réforme des trotteurs. Et pour les juments il y a une autre voix : devenir mère porteuse pour d’autres races de chevaux de sport, notamment des galopeurs ou des chevaux de CSO.

La réforme des trotteurs fait partie de la filière des courses des trots mais elle est encore peu « valorisée » par cette même filière…  Certains éleveurs et certaines associations tentent de valoriser ces supers chevaux en dehors du monde des courses. Je pourrais notamment cité les associations suivantes :

  • Je trotte donc je suis
  • Au cœur des trotteurs (l’asso d’Alpha)
  • Equiteam Performance
  • Toceur
  • Trotteur for ever
  • Ecurie Qui Trotte Vie
  • Ecurie TDS…

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